1. UNE LUTTE SANS FIN
Tendre vers la perfection en sainteté est une lutte sans fin. En tant qu' êtres humains nous sommes limités et
sujets aux erreurs. "La voie de
l'imperfection" nous domine et nous prévient que la voie de la sainteté
est presque hors de notre portée. Le conseil de François est pertinent:
"Ne nous laissons pas troubler par nos imperfections, parce que notre
perfection consiste à les combattre. Or nous ne pouvons pas les combattre à
moins de les voir, et nous ne pouvons pas non plus les vaincre si nous n'y
sommes pas confrontés. Notre victoire n'est pas de les ignorer mais de ne pas
nous y résoudre..., la seule chose qui compte, c'est de ne pas nous laisser décourager
par elles." (IVD)
L'amour a deux filles: la patience et la douceur. La patience est une
disposition mentale d'endurance soutenue par une ferme volonté de charité et de
tolérance face aux situations pénibles. Saint Paul met sur un pied d'égalité
l'amour et la patience: "L'amour est patient" (1 Cor 13:4). Jésus
nous dit: "Par votre endurance, vous sauverez vos vies" (Lc 21:19).
La patience est l'attribut des gens aimables. Par la patience nous pouvons résoudre
la plupart des problèmes de la vie.
Qui sait attendre patiemment? Les
gens sont souvent en état de stress et de pression constants. La patience est
la capacité et la disposition à attendre le temps nécessaire à l'exécution d'une tâche de longue durée. La patience est la capacité illimitée
d'endurer les épreuves et les désagréments; elle requiert le calme, la maîtrise
de soi et la volonté de tolérer les retards. La patience, la paix et l'amour
forment ensemble les trois pôles de la miséricorde.
La patience est porteuse de vie. On ne fait pas éclore un poussin en
cassant l'œuf mais en le couvant !
Entraînez-vous à la patience et vous serez maître de votre vie. François nous exhorte: "Soyez patient avec vous-même, sans vous soucier de
vos propres imperfections." La patience cultive l'aptitude à persévérer
dans un travail jamais achevé. La patience nous motive à toujours recommencer.
2. LA PAROLE DE DIEU
La patience est présentée dans la Bible comme une vertu précieuse.
Elle nous enseigne à nous accommoder de ce qui est transitoire. L'Ecclésiaste
nous dit que la vie est passagère. Il y a un temps pour toute chose (Eccl
3:1-8). La patience possède une grande force de persuasion. Le même Livre
affirme: "Mieux vaut la fin d'une chose que son commencement" (Eccl
7:7-9). Et les Proverbes l'illustrent avec plus d'insistance encore: "Par
la lenteur à la colère on fléchit un prince; et une langue
douce peut briser des os" (Prov 25:15).
La patience implique une force supérieure à celle d'un vaillant guerrier.
D'où le conseil: "Celui qui est lent à la colère vaut mieux qu'un héros, et celui qui est maître
de lui-même vaut mieux que celui qui prend des villes" (Prov 16:32). La parabole du Semeur illustre concrètement
l'art de l'attente patiente (Mc 4:26-29). Les jours et les nuits se succèdent
et le semeur poursuit sa tâche et attend comme Job; puis il admire le mystérieux
développement de la graine. Jésus illustre la patience suprême de Dieu dans la
parabole de l'ivraie (Mt 13:24-30) et du figuier stérile (Lc 13:6-9), et nous
exhorte à la patience. Les bons et les mauvais jours viendront aussi hanter
notre vie et il nous faudra, comme le fermier dans la parabole du semeur,
attendre patiemment. Toutefois la patience implique la ferme intention d'être aussi
responsable, tout comme le semeur. " Par la persévérance vous sauverez vos
âmes ", dit le Seigneur (Lc 21:19).
Saint Paul présente la patience comme un fruit du Saint-Esprit: "l'amour,
la joie, la paix, la patience, la bonté, la bénignité, la fidélité, la douceur, la maîtrise de soi" (Gal 5:22-23). Il écrit à Timothée
que le Christ "est venu déployer son immense patience en exemple pour ceux
qui croiraient en Lui et recevraient la vie éternelle" (1Tim 1:15-17).
L'apôtre, qui a pratiqué une patience extrême tout au long de son ministère,
exhorte à être patient avec tous. "Faites
en sorte que personne ne rende à autrui le mal pour le mal; mais poursuivez
toujours le bien, soit entre vous, soit envers tous" (1Thes 5:14-15). Finalement, l'amour est le critère d'évaluation
de la patience. Car l'amour vient de Dieu et c'est le fruit du Saint-Esprit
(Gal 5:22).
La foi est constamment confrontée aux défis de la vie, comme le prouve
l'expérience, et la patience est gagnante.
3. LES PAROLES DE FRANCOIS
Se supporter soi-même est tout un art de vivre. François savait l'importance non seulement de se supporter non seulement soi-même
mais aussi les autres. Il le dit succinctement: "Soyez patient en toutes
choses, mais surtout soyez patient avec vous-même" (IVD). Nous sommes
fondamentalement portés à souligner les erreurs et les limitations d'autrui,
mais n'arrivons pas à admettre les nôtres propres. De plus, nous nous cachons
nos sentiments et entretenons nos soucis: "Je n'ai pas autant de talents
que tel autre; mes performances sont inférieures à celles de mes collègues."
La simple reconnaissance et l'humble acceptation de nos propres imperfections
permettent de conserver notre tranquillité d'esprit.
Se supporter soi-même et aussi autrui sont les deux faces d'une même pièce.
Gardez un cœur aimant, réalisez l'harmonie entre les éléments internes et
externes, comme le feu qui crée des cendres tandis que les cendres préservent
le feu. François écrit: "Vous devez savoir que la
vertu de patience est la porte de la perfection" (Jam 1:4). La petite
vertu qu'est la patience détient un énorme pouvoir de transformation. François illustre ce fait par une similitude: "Rien ne calme plus
rapidement un éléphant en colère qu'un petit agneau, et rien ne brise plus
facilement la force d'un boulet de canon que la laine." (IVD) Il écrivit à
Madame Fléchère: "Par -dessus tout, ma fille,
ne perdez pas courage, ayez la patience d'attendre.(EA) et "Le plus sûr
chemin de la perfection consiste à se tenir au pied de la croix en toute
humilité et compassion du cœur." (EA)
La perfection consiste dans l'acceptation patiente de ses propres limites.
Ne désirons pas l'impossible. Que se passe-t-il lorsque vous tombez malade? Vous plaindre ne vous rendra aucun service.
Nous alourdissons nos croix en essayant de nous en débarrasser. Une fois que
vous l'acceptez, elle devient plus légère. Dans tous les aléas de la vie, cultivons
le courage de dire: "Que Ta Volonté
soit faite." Souvenons-nous des mots souvent cités par François: "Essayons toujours d'être aussi bons et attentionnés que possible
en n'oubliant jamais que l'on peut attraper plus de mouches avec une cuillerée
de miel qu'avec cent tonneaux de vinaigre."
Nous mesurons souvent notre patience à l'aune des autres et ignorons ce
faisant que l'entraînement à la patience devrait commencer par nous-mêmes.
François de Sales ajoute qu' il faut être
patient non seulement avec les détails
plus ou moins importants des malheurs auxquels nous pouvons être confrontés,
mais aussi avec les conséquences secondes et accidentelles qui en découlent.
François lui-même fut confronté sa vie durant au devoir
d'exercer cette magnifique vertu, ce qui lui valut le titre de "saint
courtois ".
Plaignez-vous le moins possible. Se plaindre est une manière de se comparer
aux autres. Éviter de se comparer et de se plaindre augmente la patience. La
patience ne peut s'exercer et se développer que confrontée aux épreuves, aux
soucis et aux difficultés. Jésus était patient, doux et humble de cœur. Sa patience trouvait sa source dans
son ardeur à satisfaire la volonté de Dieu; sa patience était la preuve de son
amour pour son Père. Tout ce que Jésus faisait et subissait, même ses pires
souffrances, l'était par amour parce qu'il était venu accomplir la volonté de
son Père et qu'il aimait à le faire (Jn 8:29).
"L'amour trouve sa source dans le cœur, et nous ne pouvons trop aimer
notre prochain et dépasser les bornes, tant que l'amour réside au niveau du cœur. Cependant, les démonstrations extérieures de
notre amour peuvent s'égarer et échapper à notre contrôle,
sortant ainsi des limites et des lois de la raison. Saint Bernard nous dit que
la limite de l'amour de Dieu est de L'aimer sans limite; l'amour de Lui doit étendre
ses racines le plus largement possible. Et ce qui vaut pour l'amour de Dieu
doit aussi s'appliquer à l'amour de notre prochain, pour autant que l'amour de
Dieu soit plus grand et tienne la première place dans nos cœurs." (Conférences
spirituelles - EA) La devise salésienne:
"Tout par amour, rien sous la contrainte" trouve ici toute sa
justification (Lettre à Madame
de Chantal).
François utilise une variété de comparaisons et d'images pour illustrer ses
arguments. Les abeilles, par exemple, trouvent leur subsistance dans des fruits
amères et produisent le miel sucré. Ainsi, souffrances et amertume sont des
moyens éprouvés pour apprendre la précieuse patience.
"Souvenez-vous qu'à l'heure de produire du miel, les abeilles se nourrissent
de produits très amers. De même, nous ne pourrions agir avec grande douceur et
patience ni fabriquer le miel d'excellentes vertus sinon en mangeant le pain de
l'amertume au milieu des épreuves de la vie. (IVD) Les vertus exercées au cœur
des épreuves et des tribulations sont les plus parfaites. Oui, notre vocation
de sainteté consiste à pratiquer la patience.
Nous n'avons pas toujours l'occasion d'accomplir des actions héroïques, mais d'autres actions plus petites abondent. Pourtant, les petites
choses faites avec abnégation donnent vraiment du poids à nos actes. "Nous
devrions préférer les vertus qui s'accordent à nos devoirs plutôt que celles
plus attirantes qui correspondent à nos goûts (IVD). François maîtrisait à fond la patience et nous en a donné l'exemple
impressionnant.
4. LA PRATIQUE QUOTIDIENNE
Vous avez peut-être entendu vos aînés dire: "Apprends d'abord à
marcher, ensuite tu pourras courir". La patience, c'est l'art d'apprendre
par la pratique. Elle nous apprend à avoir des relations sans heurts avec les
autres. Notre faculté de patience se manifeste dans la chaleur de nos
relations. Une personne de prière ne peut pas mener une vie mondaine. Comment
pourrais-je être un ange dans la prière et une bête dans mes relations? En
fait, mes relations à autrui révèlent qui je suis, et donc aussi la qualité de ma prière. Ma vie attestera si ma prière est sincère ou pas. C'est pourquoi nous devons commencer par le désir
sincère de mener une vie vertueuse. Ceci exige de changer notre attitude intérieure
particulièrement face à des situations adverses qu'il nous faudra accueillir
comme nos instructeurs. Nos erreurs du
passé peuvent devenir des maîtres efficaces sur la route du progrès.
Nous sommes en possession de nous-mêmes à la mesure de notre degré de
patience. Pourquoi ne pas user de
patience lorsque nous sommes faussement accusés ou ne pas répondre par la
douceur du cœur quand on nous réprimande? La patience envers nous-mêmes et la réaction
correspondante dans la douceur est une bonne preuve d'humilité de cœur. Cela
peut ressembler à un martyre: Vous pouvez parfois vous sentir humiliés.
Acceptez-le. Ce peuvent être des occasions de pratiquer la patience et de rester
en paix. L'amour de Dieu exige beaucoup de patience envers chacun, en premier
lieu envers soi-même.
La patience n'est pas un programme d'une seule journée mais le voyage d'une
vie. Pratiquez-la chaque jour sans vous décourager: rappelez-vous que la plus
longue course commence par un premier pas. La sagesse de la connaissance de soi
et de l'introspection nous enseigne que les gens évoluent terriblement
lentement. Mettez en pratique l'axiome:
Vis au jour le jour ! Évite de te dépêcher, ne
t'inquiète pas, détends-toi et goûte la joie de vivre.
Notre vie quotidienne nous offre d'amples occasions de pratiquer la
patience: au téléphone personne ne prend votre appel. Vous fixez un
rendez-vous... personne ne vient. Vous attendez à la gare, le train est en
retard. Notre société hyperactive et déboussolée
porte à rendre tout le monde impatient.
Saint Augustin disait que la patience est compagne de la sagesse. Faites-en
la clé de voute de votre vie spirituelle et récoltez la moisson de la sagesse.
Nous autres, êtres limités, ne pouvons atteindre que des hauteurs limitées. Le succès et l'échec font également partie de la vie. Soyons
créatifs et développons la patience et la persévérance. La tolérance et
l'assiduité à faire le bien renforceront notre démarche de patience.
L'égoïsme est profondément ancré en chaque
homme. Quelqu'un me demandait un jour s'il ne vaudrait pas mieux être "fish"
que "selfish" (jeu de mot intraduisible). Endurez patiemment l'égoïsme des autres; cela
vous conduira à l'abnégation. L'abnégation vous conduira à l'égalité d'humeur. Vous n'êtes pas parfait mais vous pouvez le devenir.
Faites pour le mieux et attendez-vous au pire, Dieu fera le reste. Par-dessus
tout, restez patient jusqu'au bout !
Plus encore, la prière est une excellente école de patience. Pensez à Dieu
pour être divin dans votre comportement. Dieu, océan de bonté, vous bénira et vous accordera une patience sans limites.
Nous autres humains ne sommes pas des anges, nous nous fourvoyons. Nous
voyons les choses à travers le prisme de notre propre ego, de nos perceptions erronées.
Soyons bons et miséricordieux. Remplissons notre esprit et notre cœur de miséricorde et de bonté, en pratiquant la patience et la tolérance.
Est-ce facile? Non. Mais c'est possible toujours et partout.
- · Comment pratiquez-vous la patience et supportez-vous l'impatience dans la vie de tous les jours ?
- · Jusqu'où va votre patience face à la maladie ou aux autres épreuves de la vie ?
- · Comment pratiquez-vous la patience dans vos relations avec votre entourage ?
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire